L’offensive des constructeurs chinois en Europe est désormais une réalité. Une dizaine de marques souvent inconnues chez nous s’apprêtent à investir le paysage. Par le biais de subterfuges – enquête européenne sur les subventions publiques chinoises aux véhicules électriques et malus environnemental mis en place d’ici la fin de l’année en France pour favoriser les productions électriques européennes -, les autorités européennes et françaises cherchent à les décourager mais ce scénario risque de déclencher une guerre commerciale avec Pékin. Leur ambition étant insatiable, les marques de l’Empire du Milieu investissent tous les segments, l’entrée de gamme comme le premium en s’appuyant sur un rapport prix/prestations sans équivalent par rapport aux références européennes et américaines.
Zeekr une marque de l’empire Geely
Alors que BYD (Build Your Dreams) s’attaque au marché de grande diffusion, Zeekr se concentre sur le marché du premium avec des modèles qui n’ont rien à envier à BMW ou à Porsche pour un tarif au moins 30 % moins élevé.
En seulement deux ans d’existence, la toute jeune marque chinoise Zeekr a déjà réussi à produire 100 000 véhicules, installer un réseau de 400 stations de recharge et mettre au point un véhicule autonome pour Waymo (Google). Un lancement en fanfare pour ce nouveau label 100 % électrique appartenant au géant chinois Geely, propriétaire de marques réputées – Volvo, Polestar, Lotus, Smart, Lynk&Co – et actionnaire d’Aston Martin. Fondé en 1986 par Eric Li dans la ville de Taizhou, dans la province de Zheijiang, Geely est venu à l’automobile en 1997. Depuis, ce jeune constructeur n’a pas traîné en chemin. En 2010, il rachetait Volvo à Ford. L’an dernier, Geely, qui emploie 120 000 personnes, a vendu 2,3 millions de véhicules dont 615 121 Volvo. Ce n’est qu’un début.
Le premier défi de Zeekr, qui s’apprête à débarquer en Europe, est de se faire un nom, au sens propre (prononcez «zikeur») comme au figuré. Trouver une place et instaurer une réputation dans le monde exigeant du premium, son patron européen en connaît bien la problématique: Spiros Fotinos a effectué une bonne partie de sa carrière chez Lexus, la marque de luxe de Toyota. «Le groupe Geely est très horizontal et chaque marque a accès aux technologies disponibles, sans hiérarchie. Nous sommes comme une start-up, mais avec les capacités d’un grand groupe expérimenté. Notre objectif est de convertir à l’électrique les conducteurs de diesels premium et nous croyons que l’expérience d’achat va être un élément fondamental dans le passage aux véhicules électriques», explique-t-il.
L’atout design
Pour mettre tous les atouts de son côté, Zeekr cultive les mêmes recettes que les références européennes. En premier lieu, le jeune constructeur s’est attaché à soigner le design, faisant appel au styliste Stefan Sielaff, ex-Bentley et Audi, pour diriger son centre de design installé à Göteborg, en Suède. Résultat: les lignes de la Zeekr 001 s’imprègnent des codes européens et évoquent les Porsche Taycan Sport Turismo et Panamera mais sur une architecture de berline surélevée (1,56 m). Avec sa silhouette de grand break de chasse (4,95 m), son long empattement, ses porte-à-faux courts et ses grosses roues de 22 pouces, la berline surélevée 001 ne manque pas d’allure et affirme une forte présence visuelle.
Le règne de la tablette
Dans l’habitacle, la marque a choisi une forme de sobriété avec des tons clairs (bleu et beige), une console centrale tournée vers le conducteur et l’incontournable tablette géante de 15,4 pouces au format paysage pour le système d’infodivertissement, ici connecté en 5G. Le système de bord semble facile d’accès et plutôt bien organisé et réactif, une bonne chose car presque toutes les commandes passent par cet écran. Il est complété d’un affichage d’instrumentation concentrant les informations de conduite devant le conducteur, complété d’un vaste affichage tête haute.
Les matériaux et assemblages sont de très bonne facture, et l’ensemble est baigné de lumière via le toit panoramique livré de série. Les passagers arrière bénéficient d’un très bel espace aux jambes, mais ils devront voyager léger, le coffre étant limité à 539 litres. Porsche fait moins bien avec seulement 446 litres pour le Taycan Sport Turismo. Notons enfin l’excellente installation sonore signée Yamaha, une première en automobile.
Le confort avant tout
Un premier essai au volant de la finition haut de gamme Privilege nous a permis de constater que la Zeekr 001 était bien née. Comme tous les modèles de la marque, cette berline a été développée par le centre technique de Volvo, à Göteborg. La présence d’une suspension pneumatique active, une exception à ce niveau de prix, distille un excellent confort, sauf en position Sport où elle devient alors trop raide. Sa puissance totale de 544 ch et son couple de 686 Nm répartis aux quatre roues par deux moteurs lui assurent des performances de premier plan, malgré une masse conséquente de 2 335 kg. Facturée 96 080 euros (97 040 € dans sa version Sport Turismo), la Porsche Taycan se contente de 408 ch. La nouvelle BMW i5 dans son exécution M60 avoue 601 ch mais exige un chèque de 107 500 euros. En Suède et aux Pays-Bas où elle est lancée cette année, la Zeekr 001 s’affiche à 59 490 euros en propulsion (272 ch) et à 62 490 € en version quatre roues motrices (544 ch). Une sacrée performance car dans le même temps, la berline chinoise rivalise en accélération avec les meilleures GT du marché. Avec 3,8 secondes pour atteindre les 100 km/h, elle fait jeu égal avec la BMW i5 M60 et devance la Porsche de 1,6 seconde sur le même exercice.
C’est dans le domaine du comportement routier que la Zeekr s’avère moins sportive que les modèles allemands et que son dessin ne l’évoque, mais cela reste cohérent avec l’usage quotidien plutôt familial d’une aussi grande berline. Agréable à mener et performante, la Zeekr pêche juste par un temps de retard au lever de pied avec la régénération maximum pour s’arrêter sans avoir à toucher à la pédale de freins.
La 001 offre une autonomie extrême de 1 000 km en Chine dans sa version équipée d’une énorme batterie de 140 kWh. Elle se contente ici d’un bel accumulateur de 100 kWh, affichant jusqu’à 620 km selon les normes WLTP. Un beau rayon d’action théorique, permis par une aérodynamique favorable avec un Cx de 0,23. La consommation autour de 20 kWh/100 km lors de notre parcours mixte parcouru à vitesse tranquille laisse envisager près de 500 km avant la recharge. Pour repasser de 10 à 80 %, il faudra compter 30 minutes avec une borne 200 kW.
Le lancement en France étant estimé fin 2024, les prix définitifs ne sont pas connus mais ils ne devraient pas être très éloignés de ceux que le constructeur pratique dans les pays où il est déjà implanté. En prime, Zeekr offre une garantie étendue de 5 à 10 ans à condition de suivre un entretien annuel. De quoi rassurer les sceptiques et faire oublier l’absence d’image de la nouvelle marque.
Fiche technique
Moteurs: 2 électriques synchrones à aimants permanents
Puissance: 544 ch
Couple: 686 Nm
Transmission: traction intégrale, 1 rapport avec réducteur
Dimensions (L/l/h): 4 955 × 1 999 × 1 560 mm
Coffre: 539 litres
Poids: 2 335 kilos
Performances (0-100 km/h): 3,8 secondes
Vitesse: 200 km/h
Consommation (mixte WLTP): 18,5 kWh/100 km
Autonomie: 590 km
Prix: environ 62 490 € (Performance AWD)